22 avr. 2013

Rome impériale

Submitted by Galswinthe
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roman sculpture of woman Palmyra Syria
Femme voilée, Palmyre en Syrie (80-120 ap. J.-C.)

 

Sculpture romaine du Ier siècle av. J.-C. au IIIe siècle ap. J.-C.

Entre le Ier siècle av. J.-C. et le IIIe siècle ap. J.-C., la sculpture romaine connut l'une des évolutions les plus remarquables de l'histoire de l'art occidental. Durant ces quatre siècles, les artistes romains transformèrent l'expression sculpturale, passant du réalisme austère de la fin de la République au grand idéalisme du début de l'Empire, puis aux formes de plus en plus abstraites et spiritualisées de la fin de la période impériale. La sculpture ne servait pas seulement de décoration ou de commémoration, mais constituait un puissant moyen d'exprimer l'identité, l'autorité et les croyances au sein d'un empire vaste et diversifié.


Fin de la République (Ier siècle av. J.-C.) : Réalisme et vertu républicaine

Au dernier siècle de la République romaine, la sculpture était un outil d'expression politique et morale. Les portraits de sénateurs, de magistrats et de patriciens incarnaient les idéaux romains de gravitas (dignité), de virtus (vertu virile) et de pietas (devoir). Les artistes privilégiaient le vérisme, un style hyperréaliste qui saisissait l'âge, les rides et les imperfections avec une honnêteté implacable. Ces portraits rejetaient l'idéal de beauté grec au profit de la vérité morale, de l'expérience vécue du service et de la responsabilité.

Les bustes en marbre et en bronze de cette époque, souvent exposés dans les sanctuaires familiaux (imagines maiorum), renforçaient la continuité ancestrale et la fierté civique. Chaque visage témoignait de la persévérance et de la discipline de l'élite dirigeante romaine.

Premier Empire (Ier siècle av. J.-C. – Ier siècle apr. J.-C.) : Idéalisation et pouvoir

Avec l'avènement d'Auguste et l'instauration du Principat (27 av. J.-C.),1 la sculpture devint un instrument de l'idéologie impériale. Le réalisme de la République céda la place à un classicisme idéalisé, influencé par des modèles grecs tels que ceux de Polyclète et de Praxitèle. Le portrait d'Auguste, jeune et serein, de Prima Porta incarne cette transformation : une image soigneusement construite de vigueur éternelle, de lignée divine et d'autorité politique.

Sous la dynastie julio-claudienne, le portrait alliait l'idéalisation de la forme à la ressemblance frappante, reflétant à la fois l'humanité de l'empereur et sa perfection quasi divine. La sculpture en relief connut un essor remarquable sur les monuments publics tels que l'Ara Pacis Augustae, qui célébrait la paix, la piété et la continuité dynastique à travers des processions naturalistes et des allégories mythologiques.

Périodes Flavienne et Trajanienne (fin du Ier – début du IIe siècle) : Le réalisme renaît

La fin du Ier siècle fut marquée par un regain d'intérêt pour le réalisme et une vitalité expressive. Les empereurs flaviens, Vespasien, Titus et Domitien, commandèrent des portraits empreints d'une forte personnalité et d'une sculpture dynamique. Ce retour au naturalisme reflétait une réaction contre l'idéalisme d'Auguste et une volonté de représenter les empereurs comme des souverains pragmatiques et aguerris, a démontré une maîtrise de la narration dans la pierre

La sculpture publique atteignit de nouveaux sommets de complexité narrative sous Trajan (98-117). La colonne Trajane, s'élevant en spirale et ornée de reliefs détaillés représentant des campagnes militaires, témoigne d'une maîtrise de la narration dans la pierre. Les figures, individualisées et animées, reflètent un nouvel esprit humaniste dans l'art romain. Cette période représente l'apogée du classicisme dans la sculpture impériale, alliant réalisme, idéalisme et raffinement technique.

Périodes d'Hadrien et d'Antonin (IIe siècle ap. J.-C.) : Classicisme et profondeur émotionnelle

Sous Hadrien (117-138 ap. J.-C.), la sculpture romaine s'imprègne d'une influence grecque renouvelée. Le portrait barbu de l'empereur introduit une nouvelle esthétique d'introspection et de grâce savante. Les sculpteurs adoucissent les traits, modelent les formes avec une plus grande subtilité et explorent la profondeur psychologique. L'art hadrien marque une harmonie aboutie entre l'autorité romaine et l'idéalisme grec.

Sous la dynastie antonine (138-192 ap. J.-C.), cet idéalisme s'accompagne d'une expressivité plus profonde. Les portraits de Marc Aurèle et de Faustine la Jeune témoignent d'un savoir-faire raffiné et d'une grande complexité émotionnelle. La colonne de Marc Aurèle, avec ses reliefs plus dramatiques et son pathétique exacerbé, annonce une évolution vers l'abstraction et une intensité spirituelle qui caractériseront les siècles suivants.

Périodes sévérienne et tardive (IIIe siècle ap. J.-C.) : Abstraction et symbolisme

Au IIIe siècle ap. J.-C., la stabilité politique de l'empire commença à se fissurer, et son art suivit le même chemin. La période sévérienne (193-235 ap. J.-C.) introduisit des formes plus rigides et schématiques, reflétant un éloignement du naturalisme classique au profit de la représentation symbolique. Les portraits d'empereurs tels que Septime Sévère et Caracalla révèlent une tension psychologique, avec des yeux profondément perçants et des expressions farouches traduisant une puissance intérieure plutôt qu'une beauté extérieure.

À mesure que les crises s'aggravaient au cours du IIIe siècle, la sculpture devint de plus en plus hiératique et frontale, privilégiant l'autorité et la sanction divine à l'individualité. Les figures s'élevèrent en figures trapues, les visages en masques, et les compositions en compositions plus abstraites. Cette transformation préfigurait l'art de l'Antiquité tardive et du début de l'ère chrétienne, où la signification spirituelle primerait sur la forme naturaliste.

 

 

 

  • 1. Le Principat désigne la première phase de l’Empire romain, instaurée par Auguste en 27 av. J.-C., lorsqu’il reçut le titre de princeps (« premier citoyen »). Ce régime associait les institutions républicaines à une autorité impériale, permettant aux empereurs d’exercer un pouvoir quasi monarchique tout en conservant l’apparence d’un gouvernement sénatorial. Il dura jusqu’au IIIᵉ siècle apr. J.-C.